Acteurs — 22 décembre 2022 at 15 h 12 min

Taraneh Alidousti

1984, 12 janvier, Téhéran
Actrice

Appartenant à la même génération d’actrices que Golshifteh Farahani, Zar Amir Ebrahimi ou Mina Kavani, Taraneh Alidousti est la fille du footballeur Hamid Alidousti.

En 2000, lors d’une visite à l’école d’art dramatique d’Amin Tarokh, elle est repérée par le réalisateur Rasul Sadrameli qui lui confie le rôle principal d’un long métrage de fiction qui porte son prénom et son âge : Moi, Taraneh, quinze ans. Son interprétation d’une adolescente mal mariée, qui se retrouve mère célibataire et bataille pour garder son enfant fait d’elle d’emblée une actrice générationnelle et lui permet de remporter en 2002 le Prix de la Meilleure actrice au Festival du film de Fajr et le Léopard de Bronze au Festival de Locarno.

En 2004, elle tourne avec Asghar Farhadi Les Enfants de Belleville. Dans ce deuxième long métrage du futur réalisateur d’Une Séparation, qui est aussi le deuxième long métrage de Taraneh Alidousti, elle incarne Firouzeh, la sœur d’Akbar, un jeune homme de 18 ans condamné à mort. Elle apparaît à nouveau comme une jeune mère divorcée, prise dans une histoire d’amour entre le devoir et l’envie égoïste d’être heureuse. C’est un rôle différent qu’elle interprète en 2006 dans La Fête du feu où elle joue Rouhi, une employée de maison, la veille de son mariage, témoin des scènes de ménage d’un couple sur le point de divorcer.

Après Canaan (2008) de Mani Haghighi et Tardid (2009) de Varuzh Karim-Masihi, et différentes apparitions au théâtre, Taraneh Alidousti retrouve Asghar Farhadi pour À propos d’Elly en 2009, où elle tient le rôle-titre aux côté de Golshifteh Farahani. La scène du cerf-volant avec faux raccords, reprise par Godard dans Le Livre d’image (2018), est devenue emblématique du cinéma iranien des années 2000. En 2013, elle étonne dans l’un de ses plus beaux rôles avec Modest reception de Mani Haghigh où elle est (déjà) Leila aux côtés du réalisateur, dans cette comédie loufoque, sorte de Bonnie & Clyde dans les montagnes du Kurdistan où un couple (amants ? frère et sœur ?) distribue des sacs de billets de banque aux habitants ne comprenant pas la motivation de ces étranges Samaritains. Sharzad, le téléfilm dont elle tient le rôle éponyme, aux côté de Shahab Hosseini, situe son action autour du coup d’État de la CIA et du MI6 contre le gouvernement de Mohammad Mossadegh en 1953.

Le Client dont elle partage à nouveau l’affiche avec Shahab Hosseini est présenté à Cannes en 2016 et remporte l’Oscar du meilleur film étranger. Comme pour À propos d’Elly, elle est à la fois au centre et à l’écart de l’intrigue. Leila et ses frères, en compétition officielle à Cannes en 2022, est sans doute son plus beau rôle. Au milieu d’une distribution réunissant quelques uns des plus grands acteurs iraniens, elle s’impose comme la meilleure comédienne de sa génération.

Très engagée en faveur des droits des femmes, Taraneh Alidousti fit scandale en 2016 lors de la conférence de presse du Client quand une photographie révéla un tatouage féministe sur son bras. En juin 2020, elle avait été condamnée à cinq mois de prison avec sursis pour avoir exprimé des critiques contre la police des mœurs, la même qui arrêta Mahsa Jina Amini, le 13 septembre 2022. Elle avait par la suite posté une vidéo montrant la violence de ces arrestations en pleine rue avec le commentaire : « Nous ne sommes pas des citoyens. Nous ne l’avons jamais été. Nous sommes des otages. Des millions d’otages. »

Le 9 novembre 2022, elle apparaît sur une photographie sans voile portant devant elle les mots « Jin, Jyan, Azadi » : « Femme, vie, liberté » en kurde, langue maternelle de Mahsa Jina Amini. Elle publiera plusieurs autres photos d’elle sans voile.

Le jeudi 8 décembre après l’exécution du premier manifestant condamné à mort, elle écrit : « Il s’appelait Mohsen Shekari. Toute organisation internationale qui regarde ce bain de sang sans réagir représente une honte pour l’humanité. Votre silence est un soutien à l’oppression et aux oppresseurs » !

Le samedi 17 décembre, elle est arrêtée à son domicile, sous les yeux de sa fille, et est conduite à la prison d’Évin dans la section 209, celle des prisonniers politiques placés à l’isolement, coupée de toute relation avec ses proches. Le monde du cinéma, à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Iran, en particulier l’acteur et réalisateur Mani Haghighi, mais aussi l’avocate des droits des femmes Narges Mohammadi ont demandé sa libération. L’actrice a été relâchée sous caution le mercredi 4 janvier 2023. On notera qu’elle est apparue le voile sur les épaules et la tête découverte montrant qu’elle continuait son combat.Parmi les personnes qui l’attendaient se trouvaient les cinéastes Mani Haghighi et Saeed Roustaee.

FILMOGRAPHIE

Long métrage :

Subtraction de Mani Haghighi, 2022
Leila et ses frères de Saeed Roustaee, 2022
Orca de Sahar Mosayebi, 2021
Le Client d’Asghar Farhadi, 2016
Les rives du destin d’Abdolreza Kahani, 2015
La mère au cœur atomique d’Ali Ahmadzade, 2015
The Wedlock de Rouhollah Hejazi, 2014
Asemane Zarde Kam Omgh (Ehtemale Makoos), Bahram Tavakoli, 2013
At the End of 8th Street, Alireza Amini, 2012
Modest Reception, Mani Haghighi, 2012
La vie les yeux fermés, Rasul Sadrameli, 2010
À Propos d’Elly, Asghar Farhadi, 2009
Tardid,  Varuzh Karim-Masihi, 2009
Shirin, Abbas Kiarostami, 2008
Canaan, Mani Haghighi, 2008
La Fête du feu, Asghar Farhadi, 2006
Les Enfants de Belle Ville, Asghar Farhadi, 2004
Moi, Taraneh , quinze ans, Rasul Sadr Ameli, 2002

Série téléviséé :

Shahrzad, 2015–2018,
50 épisodes

Court métrage :

Echo, Mahin Sadri, 2019
Where is my Romeo, Abbas Kiarostami, 2007

Dessin animé :

Jamshid and Khorshid, Behrouz Yaghmanian, 2015