Actualités — 12 mars 2024 at 22 h 35 min

Sortie en salle de « Chroniques de Téhéran » (2023) d’Ali Asgari et Alireza Khatami

Ce mercredi 13 mars sort en salle Chroniques de Téhéran (2023), coréalisé par Ali Asgari et Alireza Khatami. Présenté au dernier festival de Cannes dans la section Un Certain Regard, le film a remporté le Grand Prix du Festival du Film du Luxembourg et le prix de la critique internationale, le 10 mars 2024. Précédé d’un prologue et suivi d’un épilogue, le récit décline 9 portraits d’hommes et de femmes à Téhéran.

Les deux réalisateurs s’attachent à une forme épurée qui peut rappeler Ten (2002) d’Abbas Kiarostami par ses variations. Chaque séquence nous montre un individu au centre du cadre confronté avec un (ou plusieurs) interlocuteur(s) hors champs qui l’oblige(nt) de se soumettre à une loi qu’il rejette. Plus l’âge avance, plus on assiste à une forme de résignation. Dans sa vision mosaïque et kaléidoscopique, le film suit les différentes étapes d’une vie, de la naissance à la retraite, en passant par l’école, l’entretien d’embauche, l’obtention du permis de conduire, les démêlées avec la police ou la censure.

Les cinéastes insistent sur l’hypocrisie des relations humaines au sein d’une société de contrôle. Le titre original du film, Les versets terrestres, renvoie à un poème de Forough Farrokhzad qui décrivait un monde desséché où ne subsistait plus qu’un faible souffle de vie. C’est cette réalité de la vie quotidienne des Iraniens que nous montre le film avec une rage sourde teintée d’humour.

Tourné sans autorisation et mettant en scène des acteurs non-professionnels à l’exception de Sadaf Asgari dans le rôle d’une conductrice de Taxi accusée de rouler sans voile, Chroniques de Téhéran est un portrait de la lassitude qui touche l’Iran depuis 45 ans. Il faut relever les différents éléments qui relient certaines scènes (la grue jaune, la sonnerie de l’école, l’appel à la prière) pour saisir le passage entre l’image d’ensemble et l’image de détail mais aussi les motifs que l’on retrouve dans plusieurs plans (le jus d’orange, le drapeau de la République islamique, la figure de Michey sur un vêtement) pour comprendre le lien entre les séquences. De ce point de vue, il s’agit d’un long métrage davantage que d’un film à sketches. Une oeuvre qui nous présente les dernières minutes d’un monde voué à la chute !